Le guide des métiers pour les petites filles qui ne veulent pas finir princesses

Leadeuse d’opinion : Angela Davis

Le FBI l’inscrit sur la liste des « Wanted. » Vous voyez ces affiches « Wanted » surmontant une photo baveuse qu’on trouve dans les westerns ? Les mêmes. Davis est arrêtée deux mois plus tard et part en prison, à l’isolement. Le FBI est content, Reagan aussi, mais le reste du monde ne l’est pas. La communauté internationale se rebiffe, John Lennon et Yoko Ono écrivent une chanson (Angela), les Rolling Stones aussi (Sweet black angel), les manifestations sont innombrables – Sartre et Aragon en tête de cortège. Au procès, cernée par les caméras, l’accusation fantaisiste du FBI s’écroule. Après seize mois de détention, Davis est libre. Libre de continuer le combat, bien sûr.

Davis

Davis
(Source : FBI)

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Leadeuse d’opinion : Aung San Suu Kyi

Elle nait en 1945 à Rangoon, Birmanie. Son père est un héros de l’indépendance birmane, assassiné en 47. Sa mère est une femme politique qui devient ambassadrice en Inde en 1960. Elle s’y installe avec ses enfants. Là bas, la petite Aung San Suu Kyi découvre la non-violence de Gandhi. Plus tard, elle étudie à Oxford, épouse une bombe absolue (Michael Aris) et travaille aux Nations Unies.

Aung San Suu Kyi

Aung San Suu Kyi et sa bombe en 1973
(Photo : Aris Family collection, Getty Image)

Mafieuse : Giusy Vitale

Regardez-la, muette et glaciale devant la juge : « Taille moyenne. Plutôt rondelette. Un genre un peu lascif. Avec un comportement d’une arrogance indicible. » Les interrogatoires ne livrent rien. Un autre juge la qualifie de « rigide », « irréductible ».

Vitale
(Source : ildue)

Mathématicienne : Émilie du Châtelet

Emilie du Châtelet est heureuse à Cirey. Regardez-la : corsetée et poudrée, toute en dentelles, noeuds et pompons, elle manie le compas, le télescope, l’équerre et les mille instruments délicats qui encombrent son cabinet de physique. Que fait-elle avec ces billes de plomb ? Elle essaye de démontrer une hypothèse de Leibniz à propos de l’énergie cinétique. Pendant ce temps, Voltaire fait bouillir de la fonte pour découvrir la nature du feu.

Châtelet

Châtelet par Maurice Quentin de La Tour

Mathématicienne : Michèle Audin

Elle explore la « topologie algébrique » et la « géométrie symplectique ». Nommée professeur d’université à Strasbourg en 1987, elle pratique aussi la recherche historique. Car « elle considère que la science fait partie de la culture et tente de décloisonner science et littérature. »

Audin

Audin
(Source : site de l’Irem à Paris 7)

Microbiologiste : Rosalind Franklin

Regardez Franklin pencher inlassablement sa frange épaisse au dessus d’un énorme microscope. Elle réussit finalement à photographier des brins d’ADN. C’est une grande première.

Franklin

Rosalind Franklin : La Dark Lady de l’ADN
Brenda Maddox, trad. Samia Touhami,
Ed. Des Femmes, 2012

Microbiologiste : Nicole Le Douarin

Regardez cette vieille dame souriante qui parle avec gourmandise de ses travaux : « Les embryons, ça m’inspire. »

Le Douarin

Le Douarin en 2010
(Source : canalacademie)

Musicienne : Germaine Tailleferre

C’est en 1912 que commence la valse des rencontres étincelantes. D’abord, Darius Milhaud, Georges Auric et Arthur Honegger. En y ajoutant Louis Durey et Francis Poulenc, Tailleferre se retrouve au coeur du fameux « groupe des six ». Qui, bien sûr, étaient sept : le dernier se nomme Jean Cocteau. Ce groupe est aussi connu sous le nom de « groupe des fausses notes ». Vient ensuite Erik Satie, qui la déclare « sa sœur en musique », puis des hommes de lettres comme Raymond Radiguet, « Guillaume Apollinaire, Max Jacob, Blaise Cendrars, Léon-Paul Fargue, Paul Éluard, Louis Aragon, ou des peintres comme Pablo Picasso, Georges Braque, Fernand Léger, » Modigliani, Marie Laurencin. Autant dire que la jeune femme baigne jusqu’aux oreilles dans l’émulation artistique.

Tailleferre

Tailleferre
(Source : musicologie)

Musicienne : Sextoy

Pendant les neuf années suivantes, « que ce soit dans les bars, les clubs, les événementiels, les salons annuels ou les défilés de mode, sans oublier un nombre incalculable de raves et de free parties – du Tout-Paris à toute la France, en passant par New York, la Suisse, le Portugal, la Suède, la Norvège ou encore la Russie », Sextoy mixe sans reprendre son souffle. Regardez la : elle mesure 1m59, elle pèse 40 kilos, elle a des pointillés tatoués au ras des sourcils, des seins magnifiques qu’elle vient juste de se payer, et traîne deux énormes flight-cases remplies de vinyls.

Sextoy

Sextoy
(Source : Facebook)

29 comments for “Le guide des métiers pour les petites filles qui ne veulent pas finir princesses

  1. claire desaint
    20 mars 2014 at 11 h 27 min

    bravo, très utile à mettre dans les mains des parents.
    Je suggère de l’envoyer aux fédérations de parents d’élèves et conseiller-ères d’orientation.

    • Catherine DUFOUR
      20 mars 2014 at 13 h 39 min

      Excellente idée, je le fais de ce pas. Merci.

  2. ledermann
    21 mars 2014 at 1 h 42 min

    pour Chantal Mauduit les montagnes du Népal l’on tuer en 98

    • Catherine DUFOUR
      25 mars 2014 at 12 h 30 min

      Oui, en effet.

  3. Catherine DUFOUR
    25 mars 2014 at 12 h 32 min

    Merci ! Haro sur le pink, comme vous dites.

  4. 30 avril 2014 at 17 h 28 min

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    • Catherine DUFOUR
      30 avril 2014 at 22 h 34 min

      Mais comment donc.

  5. 14 mai 2014 at 20 h 27 min

    Je découvre le livre avec l’émission #LesMaternelles et en cherchant, le blog que je suis en train de lire avidement ! Et je me marre ! J’ai hâte de lire ton livre du coup.

    (Et si seulement on pouvait véritablement gagner sa vie en maternant !..)

    • Catherine DUFOUR
      15 mai 2014 at 9 h 22 min

      Bonne lecture et merci !

  6. sandrine
    22 mai 2014 at 14 h 48 min

    ha ha c’est une copine-maman-d’école-déléguée-parents-d’élèves qui m’a envoyé le lien sur votre livre…

    • Catherine DUFOUR
      22 mai 2014 at 15 h 18 min

      Qu’elle soit ici remerciée !

  7. pierre
    24 juin 2014 at 9 h 16 min

    à quand Catherine Dufour dans les pharmacies ? ( attention , respecter la dose prescrite : l’utilisation prolongée peut entrainer une perception déformée de la réalité … ou pas )

    • Catherine DUFOUR
      24 juin 2014 at 14 h 50 min

      Joker modérateur !

  8. manuel
    26 juillet 2014 at 14 h 18 min

    Mme Carrère d’Encausse est un mauvais exemple, la fin de l’URSS dans son livre était du à la montée des musulmans ce qui n’a pas été du tout le cas.

    • Catherine DUFOUR
      24 août 2014 at 18 h 19 min

      Erm, oui, j’aurais du songer plutôt à Suzanne Citron, nous sommes bien d’accord…

  9. Frank
    3 novembre 2014 at 10 h 07 min

    hello Catherine

    Grand fan de ton travail, avec une mention spéciale pour « Le goût de l’immortalité » que je salue comme l’un des meilleurs livres de SF que j’ai jamais lu.

    Je suis père « paternant » de 2 petites filles et je me réjouissais de partager la lecture de ton livre avec l’ainée qui a 9 ans. Mais en parcourant les fiches métiers qui sont sur cette page, je crois que ça ne va pas le faire.. Est ce qu’on retrouve dans le livre les allusions aux filles qui se touchent sur les photos d’un chanteur chinois menacé de démembrement ? Idem pour Despentes et son Baise moi dont je ne remets pas en question les mérites littéraires, mais n’y avait il pas un autre exemple de femme auteure talentueuse déjantée et libérée ? Pourquoi pas toi ?
    J’ai continué à parcourir tes fiches et je comprends pas non plus la présence des tortionnaires dans ton livre.

    J’adore l’idée générale, vraiment mais je ne comprends pas pourquoi il est comme torpillée par quelques exemples à contre-emploi qui en limitent l’impact et la diffusion potentielle. A 9 ans ma fille lit très bien et elle aurait adoré ton livre, mais je vais devoir la faire poireauter encore quelques années avant de lui mettre en les mains.

    • Catherine DUFOUR
      3 novembre 2014 at 22 h 19 min

      Bonjour, et merci. Pour ce qui est de mon Guide des métiers, il n’est pas pour enfant, davantage pour jeune fille et moins jeune. l’idée est de leur donner envie de ne pas se limiter dans leurs choix. On peut lire certaines fiches aux petites filles, mais pas toutes. « La vie est une chose très triste mais il n’est pas utile de le dire aux enfants. » (Pagnol) Quant aux fiches Mafieuse ou Tortionnaire, il m’a semblé nécessaire de montrer que les femmes ne sont pas toujours de tendres licornes. Amicalement.

  10. Frank
    4 novembre 2014 at 9 h 28 min

    Merci pour ta réponse, et pour ton conseil. Tu sais, je trouve vraiment très bonne ton idée, mais je ne peux pas faire la lecture de morceaux choisis à ma fille de 9 ans. Au delà de la frustration que cela ne manquerait pas de provoquer, elle saurait réfléchir au fait qu’il y a quelque chose d’étrange à ne pas vouloir lui laisser lire par elle même un livre si formidable.

    Je conclue, pour ne pas abuser de ton temps ni de la place sur la page, en émettant une humble requête de fan : si tu en as l’occasion un jour, ce serait super d’avoir un de tes livres qui s’adresse d’abord aux enfants. Pas pour les distraire mais pour les aider dans la petite bataille de la (des)information qui se joue dans leur univers, au quotidien. Pour que ce ne soit pas toujours les adultes qui puissent se cultiver ou s’informer les premiers quand cela concerne aussi, et parfois même en premier lieu, les enfants.

    Amicalement.

    • Catherine DUFOUR
      5 novembre 2014 at 12 h 07 min

      C’est difficile. En général, quand je propose un livre pour enfant, l’éditeur s’empresse de l’empailler en ôtant tout ce qui est sexe et mort, beaucoup plus pour plaire aux parents qu’aux enfants d’ailleurs.

  11. Chloé
    15 février 2015 at 22 h 09 min

    Bonjour,
    J’ai l’impression qu’il y a un problème sur le choix éditorial de votre livre; en le titrant pour « petites » filles et en omettant toute illustration, il ne peut pas s’adresser aux adolescentes, qui seraient pourtant son public-cible! C’est d’autant plus dommage que mes collègues professeurs-documentalistes et moi-même sommes très enthousiasméEs par les textes!
    Est-ce que ça ne pourrait pas être amélioré lors d’une réédition?

    • Catherine DUFOUR
      7 mars 2015 at 14 h 52 min

      C’est un titre humoristique, j’imagine.

  12. stefderelaymiro
    6 mars 2015 at 18 h 52 min

    Bon ben,je vais commander celui là, aussi je navigue sur les méandres du fleuve « histoire de France. Cet aprem , j’ai pouffe bêtement sur le patronyme du chaperon rouge. Dans un wagon du métro 12, ça craint ?…. Ils ont du se dire: encore une nana bourrée.

    • Catherine DUFOUR
      7 mars 2015 at 14 h 49 min

      Oh non, ils dorment tous là dedans.

  13. stefderelaymiro
    7 mars 2015 at 8 h 21 min

    Désolé pour le premier commentaire « failed », et le second à la ponctuation aléatoire, écrire un commentaire, avec son fils de 2 ans sur les genoux ,peut être épique. Donc. Je vais commander ce guide dont le titre m’attire déjà. En attendant je rigole toute seule sur la banquette d ‘un métro. Pov’ Vareuse. Je fini par avoir honte de ne pas vous lu plus tôt. Comme quoi l’autopromotion c’est la solution.sur ce je retourne m’occuper de mon pti tyran domestique. Si il continue je vais en faire une grenouille.

    • Catherine DUFOUR
      7 mars 2015 at 14 h 48 min

      Ou une citrouille ? Bon métro.

  14. 20 mars 2015 at 16 h 20 min

    Je viens de le finir. amusants certains choix.
    sans hésiter : J’aurais voulu être Florence Aubenas, pas pour ses mésaventures, non.
    pour son humanité sa dignité et sa plume.
    J’aurais pu être Sextoy dans une autre vie, mais je suis nulle au violon.
    Si vus faites un second tome, j’ai 2/3 idées.
    Routier, kiosquière, joueuse de foot ou de rugby …. tout sauf princesse ou alors celle là:
    https://www.youtube.com/watch?v=4CBGiLgTYgM

  15. P.
    6 janvier 2016 at 17 h 43 min

    Bonjour,

    Il m’a fallut 20 ans pour rencontrer des filles qui ne voulaient pas être des princesses… Enfin presque, j’ai bien une de mes tantes qui n’a jamais voulu être une princesse (elle voulait être cascadeuse, ça n’a pas marché, mais l’ambition était là), mais elle ne comptait pas c’était déjà une adulte quand j’étais une adolescente, autant dire qu’à cette époque aucun adulte ne pouvait me comprendre… Comme tous les adolescents idiots du monde qui pensent qu’ils sont les seuls à souffrir…
    Et puis on m’offre votre livre, je trépigne, j’adore le titre, et puis je regarde l’auteur, j’adore l’auteure aussi (j’ai lu blanche-neige et les lances missiles, je me suis bidonnée). Je ne me suis toujours pas miraculeusement transformée en princesse, les princesses c’est nul et chiant, et moi je suis chiante mais pas nul et puis je déteste le rose. Je ne serais jamais une princesse, ce livre est pour moi, je le sais !
    J’ouvre le livre, ce livre qui parle de métier, pendant « une pause » à mon travail et je lis :  » en matière professionnelle, on a le droit d’évoluer, voire de bifurquer, et même de faire volte-face et de changer du tout au tout. » Ironie ? Moi qui m’ennuie tellement dans un boulot que j’ai rêvé de faire, parce que je n’ai rien à faire, mais rien à faire. A part tous les trucs que j’invente pour m’occuper et essayer d’être professionnelle et qui des fois ne suffisent plus. Psychologue, quand personne ne vient vous raconter ses malheurs c’est chiants comme la pluie.
    Bref tout ça pour dire que j’aime beaucoup ce que vous faites : votre écriture, votre humour et vos idées. Vous arrivez toujours à point nommé dans ma vie, même si ce n’est pas de votre fait 🙂

  16. Jean-Dominique Orvoën
    22 novembre 2020 at 10 h 01 min

    Bonjour Catherine,

    nous nous sommes rencontrés aux mercredis de la SF et vous m’y avez dédicacé l’excellent ‘Blanche neige & les lance-missiles’.
    (nous nous tutoyions à l’époque).

    J’ai acheté aussi ‘Le guide des métiers…’ et attendu 3 ans avant de le donner à ma fille aînée de 12 ans. Sur Caroline Aigle, j’ai relevé une erreur : ‘binet’ ne signifie pas ‘cabinet’, mais ‘club, association d’élèves polytechniciens’: https://fr.wiktionary.org/wiki/binet . Ce serait dû à un militaire qui avait encouragé au XIXème siècle les associations, mais je n’ai trouvé aucune preuve. Les associations de polytechniciens diplômés s’appellent par contre X- : X-sursaut, X-crises, X-environnement, …

    Je suis polytechnicien, même promotion que Caroline Aigle avec qui j’ai suivi des cours de secourisme, et brièvement parlé de course à pied. Merci d’avoir parlé d’elle.

    • Catherine DUFOUR
      26 novembre 2020 at 20 h 40 min

      Merci à vous pour votre message !

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