[nos amis les gens] Le genre des antilopes
(une séance de photos de vacances)
Gwen H. [safariste] : J’ai compris la différence entre les hommes et les femmes en Afrique. En regardant les antilopes. Regardez : deux antilopes face à face, front contre front – on ne peut pas dire qu’elles se battent : les cornes emmêlées, le nez plongeant, elles s’endorment. On voit leur museau piquer vers l’herbe, toujours plus bas… Et puis l’une des deux fait un rêve, elle bronche, ça réveille l’autre, les deux recommencent vaguement à se battre et – elles – se – rendorment – tout – dou-ce-ment. Bon, si on regarde attentivement, on voit que ce sont deux mâles. Ils ne se battent pas par conviction. Ils se battent parce que c’est ce que font les mâles dans la horde. Ils se battent pour un territoire, pour les femelles, pour s’occuper. Ils se battent entre eux.
A côté d’eux, la même antilope, mais allongée en train de ruminer. Vous la voyez ? Elle mâchouille tout en scrutant les alentours – l’oreille frémissante, c’est clair. Elle surveille le territoire. Elle se fiche absolument des deux autres. Accessoirement, elle a un petit qui veut téter. On ne le voit pas parce qu’elle vient de s’en débarrasser d’un coup de corne – bon, ce n’est pas une mère très affectueuse mais définitivement, c’est une femelle qui allaite. Et qui s’occupe du territoire. Elle, ce qui l’intéresse, ce ne sont pas les membres de son espèce mais tous les autres – surtout ceux avec des dents. Pas de compétition interne mais une grande méfiance pour tout le reste. A la limite, si les deux premières antilopes peuvent se battre tranquillement, c’est parce que la troisième assure le suivi.
Ce qui me plaît, dans cette photo, c’est que physiquement, ces trois antilopes sont semblables : même taille, mêmes cornes, même tout. Il faut un téléobjectif pour décider du sexe. Mais le genre se lit dans leur comportement en un quart de seconde.