[nos amis les gens] Un grand silence gazeux
(un studio)
Pierre M. : Tu sais qu’à une époque, les gens adoraient se suicider au gaz de ville ? Ca ne sentait rien et ça tuait vite. Il suffisait d’ouvrir le four, d’allumer le gaz, de poser la tête sur la grille et d’attendre un peu. On mourait asphyxié. Accessoirement, à un moment ou un autre, quelqu’un entrait dans la pièce, allumait la lumière et boum ! Tout le quartier y passait. Donc, on a changé la composition du gaz de ville pour qu’il ne tue plus, et on l’a mélangé avec je ne sais trop quelle saleté pour qu’il pue l’ail. Il y a une usine qui fabrique cette odeur immonde. Et un jour, l’usine a eu une fuite : tout l’ouest parisien s’est mis à puer le gaz de ville, tu te souviens ?
Le lendemain, coïncidence, il y a je ne sais plus quelle cérémonie du souvenir de la seconde guerre mondiale, avec duplex Paris-Berlin, tout un tremblement. Le journaliste envoyé spécial en Allemagne appelle de Berlin, tout fier :
– Alors, comme ça va à Paris ?
Sa correspondante à Paris, grande forme :
– Ouh ! Ici, ça sent le gaz !
Il y a eu un de ces blancs.