[nos amis les gens] Le syndrome bozabi
(un dressing)
Julie B. : Quand j’étais petite, on avait des habits de fête. Des habits qu’on mettait pour Noël et pour les mariages du mois de juin. Les « beaux habits ». Ma mère me disait : « Attention à tes bozabi ! Va pas les abimer en te roulant partout. » Le reste de l’année, on rangeait les bozabi sous des housses et, de temps en temps, j’allais les regarder. Et l’année d’après, eh bien, ils étaient trop petits. Il y a certaine robe taille quatre ans que je rêve encore de mettre. Bref.
Un jour, je trouve du travail. Comme je n’avais que des jeans dans ma penderie, je vais dans des boutiques, j’hésite, je calcule, je cherche, et enfin ! Je déniche un tailleur trop beau. Bleu pâle, un tissu tout doux, coupe cintrée, petits boutons dorés, superbe. J’aurais du me méfier. Je l’ai acheté et crac ! Le syndrome bozabi direct. Je l’ai mis une fois, ce tailleur. J’avais un balai le long de la colonne vertébrale, je n’osais ni m’asseoir de peur de froisser l’arrière de la jupe, ni poser mes mains sur la table de peur de tacher les manches. Je suis rentrée chez moi, je l’ai accroché sur un cintre et ensuite, je l’ai regardé… Il est toujours là. Jamais pu le mettre.