Parce que l’art, c’est prouver que ce qu’on fait est meilleur que ce qu’on est.
Pour moi, il y a deux Peintures : la concave et la convexe – celle qui sort du cadre pour vous coller au mur, et celle qui vous invite à enjamber le cadre pour aller voir comment se continue le paysage, au delà. Celle qui vous prend la tête en braillant et celle qui vous prend par la main en murmurant d’une voix de sirène.
Pour moi, il y a Guernica et les prisons du Piranèse.
Pour moi, il y a deux Femmes : les pétasses en A et les autres. Les pétasses en A sévissent chez les artistes – Gala, Elsa, Nadja, des chieuses aux yeux fous et aux comptes bancaires rationnels. On dit : des Muses.
Hier soir j’ai dîné avec Zelma, qui fut la Muse de Toussaint Settbon. Zelma, en bonne et due Muse, a la cinquantaine efflanquée, des cheveux de gitane, le cuir trop cuit et des pâtés sur la gueule (du khôl, du fard à joue, du rouge à lèvres). Tout ça est emballé dans des voileries noires qui puent la clope et lesté par des bijoux en argent crasseux qui tintent à rendre folle une vache suisse.
Je n’arriverai jamais à donner de Zelma l’impression qu’elle donne à tous, celle d’une belle pute vieillissante dont on suppose qu’elle a posé à poil pour des génies drogués sous d’immenses verrières glaciales – d’une main elle boit un Tequila-Mezcal, de l’autre elle caresse ses beaux seins gercés. Drapée dans sa chevelure elle incline sur une épaule frissonnante son beau crâne ravagé par l’Art et l’Opium…
Je n’y arriverai jamais. Zelma est vraiment trop conne. D’ailleurs Toussaint Settbon était un gros con.